Je regardais mon frère qui faisait mes bandages de la journée. L’ambiance était toujours aussi froide entre nous deux, je mettais un point d’honneur à ne pas lui parler, à ne pas le regarder. Je regardais en face de moi et je me laissais manipuler afin qu’il fasse mes soins. Je ne pouvais pas encore les faire toute seule, malgré que je sois infirmière. Le silence fait mal mais je n’ai pas envie de lui parler, non, il m’a brisé le cœur. C’est dur de l’éviter mais je tiens bon. Je lui montre que son mensonge m’a profondément blessé. Le pire c’est qu’on habite sous le même toit. On doit quand même garder une entente cordiale pour son fils. Je ne cligne pas des yeux, je grimace légèrement lorsqu’il appuie sur la blessure. Il s’excuse et je ne dis rien, je ne lui souris même pas, je me contente de regarder en face de moi. Je sais bien qu’il se sent mal, mais je voulais qu’il comprenne une bonne fois pour toute. Je voulais lui faire passer l’envie de me mentir à nouveau. Il me dit ensuite qu’on a fini. Je le remercie légèrement et je monte dans ma chambre pour prendre ma veste. Je respectais mes paroles, je n’étais qu’à la maison pour mes soins, dormir ou passer du temps avec mon neveu, sinon, je fais tout pour déserter cette baraque. Ce n’est pas chez moi, j’aime pas et puis croiser mon frère tous les jours, c’est vraiment difficile. J’attrapais ma veste, mon sac et je redescendais vite les escaliers. « Tu restes p.. » mon frère n’avait pas le temps de finir ma phrase que j’avais déjà fermé la porte. Je descendais les quelques marches pour rejoindre la rue et me fondre dans la foule. Il y a toujours du monde à New-York, c’est affolant. Je ne savais pas trop où aller manger ce soir, j’avoue que j’aimais bien découvrir les restaurants de la ville. Je ne mange jamais au même endroit, ça me permet de découvrir la ville, ne sachant pas combien de temps j’allais encore devoir resté. On m’avait parlé d’un resto en ville et j’avais décidé de m’y rendre. On m’avait filé l’adresse, je levais la main pour faire du stop et attrapais un taxi. Je lui tendais le papier et il me dit que c’est partit. Il met la musique un peu plus forte et je m’affale dans le siège arrière tout en soupirant doucement. Je regarde la ville qui défile sous mes yeux. New-York c’est beau mais être posé dans une ville, ce n’est vraiment pas pour moi, j’ai besoin de voyager. Je suis dans mes pensées, je me laisse bercer par la musique qui est dans le taxi et je me surprends à rêver de tout et n’importe quoi. Je lui file l’argent et je sors ensuite de la voiture et je me retrouve dans un endroit super chic. Rien que l’extérieur fait rêver. Personne ne m’avait prévenu qu’il fallait avoir un minimum de classe. Heureusement, j’avais mis une robe et des petits talons. En poussant la porte, je vis que ce n’était pas le même « level », c’était vraiment élégant et chic. J’étais là pour manger, il fallait bien essayer après tout. Je fais quelques pas dans l’établissement, qui est vraiment rempli. Je sens que je vais devoir aller manger autre part. Un serveur vient à ma rencontre. « Excusez-moi mademoiselle, avez-vous réservé ? » Ah oui, bah non, je le regarde en disant «Non, pas du tout.. » Il me fait un sourire gêné tout en disant « Il est préférable de réserver, c’est un restaurant réputé, je vous conseille de nous appeler avant de vous déplacer pour rien.. A moins que vous vouliez attendre deux heures pour une table. » Je lui fais un sourire un peu gênée, j’aurais sans doute dû m’en douter en voyant la devanture de l’établissement. Je passe ma main dans mes cheveux quand un homme s’adresse au serveur. Il m’invite à dîner à sa table, je le regarde et je ne sais pas trop quoi dire pendant quelques secondes. « Euh.. Oui d’accord avec plaisir ! Merci beaucoup monsieur. » Je regarde le serveur qui semble plutôt satisfait du coup. Il m’emmène vers la table du jeune homme, il tire ma chaise pour que je puisse m’asseoir. Je me retrouve alors en face de l’homme qui a sauvé mon dîner si je puis dire ça comme cela. « Merci encore de me l’avoir proposé, c’est vraiment gentil de votre part. Je m’appelle Syham, c’est plus sympa de savoir le prénom de la personne en face de nous quand on partage un dîner. » je lui tends ensuite la main avec un sourire chaleureux. Si je le connaissais, je lui aurais sans doute sauter dans les bras mais certaines personnes n’aiment pas trop ces élans-là.

Un inconnu venait de me sauver ma soirée. Quelques années auparavant, je lui aurais limite sauté au cou comme une grosse folle mais là, je vais tenter de ne pas l'effrayer et puis, j'ai grandi. Je me suis calmée à force de faire des voyages humanitaires, je suis beaucoup plus mature et plus adulte. Pourtant ce n'était pas l'envie qui m'en manquait mais le cadre était vraiment trop classe. Le responsable allait sans doute me faire virer donc non, je reste calme. Le jeune homme prend ensuite ma main et se présente également. Je lui lance un petit sourire tout en lui répondant « Enchantée Fallon, le plaisir est également partagé. Vous sauvez ma soirée. » Je continue de sourire et je regarde autour de nous, c'est plutôt calme. Les gens discutent tranquillement, ce n'est pas les ambiances de fast-food ou des petits restos avec des prix abordables. Je regarde mon interlocuteur qui à l'air bien pensif, je décide de ne pas le déranger, jetant un bref coup d'oeil sur la carte. C'est cher, horriblement cher. On me l'a recommandé, donc j'espère que ça vaut vraiment le déplacement. Ce n'est pas dans mes habitudes d'aller dans un restaurant aussi huppé. Une fois qu'on a connu la misère, les fast-food c'est un restaurant de luxe. Fallon me demande ensuite ce que je viens faire dans un restaurant toute seule. C'est une question bien compliqué. Si je lui déballe ma vie comme ça, il va croire que je suis une dépressive ou que je suis en manque d'amis.. Ce qui n'est pas faux, je n'ai pas vraiment d'amis, ayant toujours eu un style de vie de nomade. Je vais éviter de lui déballer la trahison de mon frère qui me pousse à le fuir comme la peste. Ou le fait que je me sois tiré dessus par des rebels dans le Moyen-Orient. Je le regarde tout en souriant doucement « Disons que je viens d'arriver en ville, je voulais à tout prix découvrir le meilleur restaurant de New-York. » cette version là était la plus simple et la moins ennuyante. Je voulais qu'on passe une bonne soirée et je n'avais pas envie de penser à mes problèmes. « Et vous ? » Je continue de sourire. Je n'avais jamais fait ça auparavant. En général, j'avais une table toute seule. La solitude ne me gêne pas, mais j'aime beaucoup parler aussi, apprendre des autres. C'est pour ça que je suis infirmière et que je fais le tour du monde avec des associations. Fallon n'était pas le genre de type avec qui je traînais d'habitude, mais il a l'air vraiment sympathique. Le serveur revient à notre table pour nous proposer un vin. Je dois dire que je n'y connais absolument rien. Je laissais monsieur gérait la carte des vins. Je regardais le serveur et Fallon tour à tour. Il commandait du rosé et il me demandait si je voulais autre chose. Je fis un petit sourire en disant « Non merci, c'est parfait. » Je lui rends ensuite la carte des vins puis il repart ensuite. Nous sommes plus que tous les deux, à nouveau. Je souris en disant « Je dois dire que je ne m'y connais absolument pas en vins, alors je vous fais confiance. » Je lui fais un clin d'oeil tout en riant légèrement et en ajoutant « Vous habitez à New York depuis longtemps? » Je lançais à nouveau la conversation pour éviter de tomber dans un blanc gênant et puis quand je dine avec une personne j'ai horreur des blancs. Ce n'était sans doute pas la meilleure question mais bon on verra bien. J'attendais sa réponse tout en souriant. Je me concentrais quelques instants sur l'autre carte pour voir ce qu'il proposait en plats tout en levant les yeux vers le jeune homme qui se trouve en face de moi.

Cette soirée improvisée me plaisait plutôt bien en fin de compte. La solitude ne me dérangeait pas mais un peu de compagnie ne me fait pas de mal, cela me mets de bonne humeur et ça m'évite de penser au conflit entre Louys et moi. Enfin, c'est plus moi qui suis en conflit avec lui. Je ne supporte pas le fait qu'il m'ait menti. Notre cohabitation est un véritable enfer. On met un point d'honneur à s'éviter. Enfin, moi plus que lui. S'il le pouvait , il camperait devant ma chambre pour que je lui pardonne. Il veut tout le temps s'expliquer mais je ne suis pas prête à l'entendre,encore moins à le comprendre, pour moi, c'est tout simplement inadmissible. L'ambiance à la maison est lourde, même devant mon neveu. C'est pour ça que je fuis cette maison et que je suis dans un restaurant, en compagnie d'un homme charmant. Un inconnu, mais qui a l'air très gentil. Il me sortit de mes pensées avec sa réponse. Je souris tout comme lui tout en répliquant « C'est vrai que ça ne pouvait pas mieux tomber, promettez-moi que vous remercierez la personne qui s'est désistée. » Je lui fais un clin d'oeil tout en riant légèrement. Le serveur revient ensuite avec la bouteille de rosée et nous en sert un peu. Je le remercie et saisis alors le verre que je porte ensuite à ma bouche. Je fais également un signe de tête et un petit sourire au serveur pour lui montrer que j'apprécie aussi. Une fois ma réponse donnée, il s'excuse et tourne les talons pour aller s'occuper d'autres tables. Je le suis vaguement du regard avant de me concentrer sur mon interlocuteur qui me répond qu'il n'est pas à New-York depuis toujours. Je le regarde pour lui montrer que je m'intéresse à ce qu'il me dit. On partage un diner ensemble, c'est la moindre des choses. Il me retourne la question, oh, il y en aurait des choses à dire sur mon enfance. Mes parents ne sont pas du genre sédentaires. « Je vois, vous êtes quand même un New-Yorkais, vous faites un retour aux sources. Vous avez beaucoup voyagé en Amérique ? » Je montre que je m'intéresse à ce qu'il dit, ce n'est pas de la curiosité mal placé, c'est histoire de faire la conversation et d'apprendre à se connaître aussi. Je réponds ensuite à sa deuxième partie de question. « Oh moi, j'ai voyagé un peu partout. Mes parents ne restent jamais plus de deux ans au même endroit.. et j'ai pris goût au voyage moi aussi. Je suis à New-York temporairement.< » Je lui fais un petit sourire en même temps que ma réponse. Le temps que ma blessure cicatrise et que je puisse enfin reprendre mon job d'infirmière dans les associations humanitaires. J'adore partir en mission et découvrir d'autres civilisations, d'autres cultures. Je me plaisais beaucoup là où j'étais. Nous venions en paix et mon équipe et moi avons été massacré. La guerre entre l'Orient et l'Occident. Il me demande ensuite si on peut se tutoyer, c'est vrai que nous ne sommes pas dans le cadre professionnelle et que c'est mieux. Je hoche la tête en disant « Oui, avec grand plaisir, je me sentirais un peu moins vieille et on est à peu près du même je pense. » je rigole légèrement tout en le regardant et en baissant les yeux sur la carte afin de décider ce que j'allais prendre. A vrai dire, tout était tentant. Je ne suis plus vraiment difficile niveau nourriture, tant que ça se mange. Les plats avaient l'air raffiné. « Tu viens souvent ici ? Car j'ai besoin de conseil, je ne sais absolument pas quoi prendre. » Je rougis légèrement tout en le regardant à nouveau. Je n'aime pas trop avouer que j'ai besoin de quelqu'un, même d'un conseil. J'ai un sale caractère, on ne se refait pas, surtout à 24 ans. Je continue d'avoir les yeux rivés sur la carte tout en les levant de temps en temps pour faire face à Fallon.